dimanche 3 mai 2009

Is it me, is it true ?


« - Combien ?,» demanda-t-il.


La pièce plongée dans la pénombre fut balayée un bref instant d’un halo jaunâtre alors qu’une voiture passait dans la rue.


« - Zéro, répondit elle en envoyant une volute de fumée se faufiler à travers ses cheveux.

-Ce n’est pas ce que nous avions convenu, je suis contrarié,» dit l’homme d’une voix grave.


Assise sur une petite commode en fer forgé, elle continua de fixer ses pieds dénudés imperturbablement.

« -Je ne pouvais pas le…

-Silence. Les consignes sont simples, nous te donnons ce que tu désires, tu fais ce que tu as à faire en échange, l’interrompit l’homme.

-Chéri je ne savais pas que tu étais si indépendant de mes moindres faits et gestes, le nargua-t-elle.

-Ne me provoque pas. J’ai déjà assez de comptes à rendre comme ça pour que tu ne fasses pas ta part de travail,» rétorqua-t-il.


Elle releva lentement la tête, ses cheveux se déployant de chaque côté de son visage. Ses yeux brillaient d’une lueur étrange. En souriant elle renversa son corps en arrière de manière provocante, s’appuyant sur ses avants bras, laissant ses jambes choir dans le vide.


Il regarda ses jambes, sa jupe qui, entraînée par le mouvement était légèrement remontée et grogna :

« -Cesse de jouer, si tu n’es pas capable de respecter le contrat, tu nous es inutile.

-Si je suis inutile, tu l’es également, vous l’êtes tous, trancha elle.

-Des tas de personnes seraient capable de ce que tu n’as pas su faire, tu n’es pas irremplaçable.»


Un corbeau se posa sur un des réverbères près de la fenêtre de l’appartement en croassant.

« -Conneries ! Je ne suis pas remplaçable et tu le sais aussi bien que moi !, s’emporta elle en se rasseyant et en croisant les jambes.

-Peu importe… Ta tâche aujourd’hui était simple et tu t’es lâchement dégonflée, tu n’es pas à la hauteur», dit l’homme d’un ton calme.


Nerveuse, elle fit tourner sa cigarette entre ses doigts sombres.

« -Cette conversation m’ennuie, décréta elle.

-Tu n’y échapperas pas.

-Pourquoi est-ce à moi de faire le sale travail ?

-Parce que c’est ce pourquoi tu es faîte, répondit-il inexorablement.

-Ce n’est pas moi, ce n’est pas vrai !» hurla la jeune fille.


Il s’approcha d’elle alors qu’elle sautait d’un geste souple du petit meuble. L’homme la saisit par le poignet.

« -Ne me touche pas ! s’insurgea elle.

-Réponds alors ! Nous avions un marché…

-Lâche-moi ! hurla-t-elle en se débattant.

-Tu n’es qu’une pauvre femelle incapable et sans défense…

-Tu me fais mal !

-Pourquoi n’as-tu pas tué cette femme comme tu le devait ?» vociféra l’homme.


La jeune fille s’immobilisa.

Glacée.

Ils se scrutèrent un court instant, sentant le corps de chacun exhaler sa chaleur.

A l’extérieur, le corbeau agita ses ailes de ténèbres.

L’homme la lâcha en la repoussant.

Vacillante mais sans quitter l’homme du regard, elle retourna s’adosser à la commode.

Elle soupira puis s’humidifia les lèvres :

« -Elle… elle n’était pas seule.

-Tu n’es jamais seule avec tes futures victimes ! railla l’homme.

-Je le sais ! Elle était avec… son fils, un tout petit garçon…» avoua elle en passant sa main libre sur son front.


Le visage de l’homme se décomposa avant de former ce qui ressemblait à un sourire.

« -Tiens donc… Mademoiselle a des états d’âme sur ses victimes désormais… Petite idiote, qu’imaginais-tu ? Que les autres personnes que tu as tuées étaient des SDF sans famille ? Sans vie ?

- Ferme-la. Bien sur que je le sais ! C’est juste plus simple de faire semblant de l’ignorer… Aujourd’hui, c’était… trop concret…,» dit elle en fermant les yeux.


L’homme grommela quelque chose d’inaudible en se dirigeant vers la porte.

« -Tu peux quand même rester…, proposa elle froidement.

-Le sexe entre nous est démodé. De plus, je ne te désire que lorsque tu accomplis ton devoir, » rétorqua-t-il d’un ton sec.

-C’est une chance. Moi je ne te désire jamais. Et lorsque tu dors, c’est encore moi qui continue d’hurler.»


L’homme se retourna lentement et la dévisagea.

« -Le désespoir dans tes yeux est magnifique. Est-ce que tu seras capable d’exécuter ton destin la prochaine fois ? demanda-t-il.

-Je serais prête, répondit-elle. Et sache que le jour viendra où c’est toi que je tuerais. Sans aucun état d’âme.»


Sans un mot, l’homme quitta la pièce en silence. La jeune fille demeura statique plusieurs minutes. Enfin, elle s’approcha de la fenêtre. Les yeux dans le vague, elle fixa le corbeau comme s’il était un vulgaire objet.

« Qu’est-ce que tu regardes ?»


Le corbeau s’envola.


¤ I listen to you but your words don’t make a sound ¤

¤ Fake salvation, lost translation ¤


To L.


1 commentaire:

Steve a dit…

J'aurai remplaçer le corbeau par quel chose de plus stupide , mais j'aime beaucoup les details du texte .